Cette année encore, de nouveaux records du côté des SMS ont été enregistrés le 31 décembre à 23:59:59 et nos boîtes mails saturées regorgent de toutes sortes de souhaits. S’il est une tradition que le numérique n’a pas balayée, c’est bien celle des vœux. Une pratique qui consiste finalement à se souhaiter tous une excellente année, alors même que – et cette année tout particulièrement ! - on redoute le pire. Certains, inspirés par les Mayas, envisageant même l’Apocalypse…
Loin de nous l’idée de dénigrer une tradition. La véritable sociabilité s’exprime aussi à travers ces petits rites, aussi formels ou phatiques soient-ils. Il ne s’agit pas non plus de regretter les cartes de vœux et leur envoi massif souvent effectué in extremis par des assistantes. Mais une question nous taraude en cette période des vœux : et si le numérique pouvait aussi servir à rendre vraiment l’année meilleure à certains qu’ils soient dans notre pays ou à l’autre bout du monde ? Et si disruptif pouvait rimer avec caritatif ? Numérique avec philanthropique ?
Et de fait, c’est ce qui est en train de se dessiner. Une nouvelle efficacité numérique a été testée pour Haïti, lors du séisme de 2010 qui a déclenché un élan de solidarité remarquable de par le monde. Grâce aux téléphones portables, un service “Text Haiti” a été mis en place permettant la collecte de dons et la coordination des organisations d’assistance aux victimes, par téléphonie : le simple fait d’appeler un numéro débite son compte d’un montant dirigé directement aux victimes. Une même impulsion mêlant générosité et efficacité technologique a pu être observée cette année pour le Japon touché par un Tsunami en mars. Une aide mondiale qui a eu pour vecteurs Internet, Skype et les réseaux sociaux.
Conscients qu’il y a là des gisements à exploiter, les Américains, notamment à l’Université de Stanford et au Département d’Etat (1), mettent sur pied des programmes qui, par une approche multidisciplinaire, s’attachent à imaginer et construire toutes sortes de ponts entre nouvelles technologies et aide au développement.
D’une part, par l’utilisation des nouvelles technologies comme moyen de paiement, via son téléphone mobile notamment. Par ce biais peuvent maintenant s’organiser des transferts bancaires numériques sécurisés qui évitent les pillages, les détournements, tout en garantissant la sécurité des transactions. Une méthode à l’abri de tout risque de corruption, où la technologie est utilisée dans l’exercice diplomatique de développement.
Mais aussi, d’autre part, au-delà de la seule aide financière, en offrant, via le numérique, du temps. Ce temps éminemment précieux de la transmission du savoir et des techniques. Un domaine qui peut être largement développé pour favoriser des échanges de connaissances, des transferts de technologie, mais aussi pour développer l’enseignement. Pourquoi ne pas envisager des classes dans les villages les plus reculés de la planète, où un professeur pourrait enseigner virtuellement via un grand écran ? Pourquoi ne pas même envisager des bénévoles dans chaque pays qui pourraient par écrans interposés aider des jeunes à faire leurs devoirs après l’école?
Grâce à ces développements et à Internet, chaque citoyen peut, s’il le souhaite, se muer en cyberphilanthrope, et envisager de faire don de son temps, en partageant ses connaissances, via Skype ou bien Youtube. L’ampleur de ces développements dépend évidemment de la participation de chacun d’entre nous. Les petits clics peuvent produire de grands effets. Mais tout cela n’est possible en dernier ressort que si la fracture numérique se trouve réellement réduite. Car justement les pays les plus défavorisés sont aussi ceux qui restent à l’écart du développement numérique et de ce fait hors du champ de toute Liberation Technology… On le sait, de grands mécènes s’emploient à réduire cette fracture numérique au niveau mondial, des grands États leur emboîtent le pas. Mais rien ne se fera pleinement sans la participation de tous ceux qui ont le privilège d’accéder à Internet. Une participation d’abord individuelle qui peut prendre un écho collectif via les réseaux sociaux…
Alors, qu’il nous soit permis de formuler au moins un vœu pour 2012 : « Cyberphilanthropes de tous pays, unissons-nous ».
par
Brigitte Ades
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